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Un dernier thé sur la route (7 septembre)

C’était il y a quatre mois. Ce matin là sur mon vélo, je quittais Urumqi, au fin-fond de la Chine… C’était il y a quelques jours. Un soir de septembre, j’arrivais à Hong Kong en pédalant. Comme si une longue journée séparait les vents à 100 km/h du Xinjiang et les échangeurs autoroutiers de l’ancienne colonie anglaise. Une journée interminable, la journée la plus riche de ma vie, une de celles que même Jack Bauer n’a jamais vécues.

Je ne connaissais pas grand-chose à la Chine, et voilà que je peux en parler sans me sentir ridicule. J’ai vite renoncé aux merveilles touristiques. Encore mieux que les photos des bâtiments coloniaux de Canton, un thé matinal avec Vincent, mon hôte chinois. Il n'est pas encore dix heures et le restau est bondé de familles ou d’amis venus savourer le début de journée ensemble. On sait profiter de la vie ici. Au menu, bouchées de crevette à la vapeur. Soupe à l’agneau et aux courgettes, canard laqué avec sauce sucrée, anguilles aux fleurs de lotus, morceaux de papaye dans du lait sucré bien frais : terminés les plats graisseux ou/et épicés avalés tout au long du chemin, la cuisine cantonaise est extraordinaire, au point qu’elle me donne envie de m’installer ici. Seul hic, on n’y parle pas le chinois. Pas au quotidien du moins. On parle le cantonais et même si mon niveau de mandarin n’était pas très élevé, apprendre cette autre langue (qui a encore plus de tons !) me motive autant que de me mettre au papou.

Hong Kong aussi parle le cantonais. C'est à peu près le seul point commun entre les deux villes. Passé la douane, et surtout débarqué sur Hong Kong Island, on n'est plus vraiment en Chine, mais sur une sorte de planète internationale non-identifiée. Plus question de faire le cirque dans les restaus en criant « Je suis Français » sous les yeux éberlués des clients. Plus personne ne me regarde, plus personne ne se regarde. Les faciès composent une palette plus riche que celle de Benetton entre les agents de sécurité indiens, les bonnes philippines ou indonésiennes, les requins de la finance américains et européens… Et n’oublions pas au rang des curiosités, les ABC (American Born Chineese), les BBC (British Born Chineese) et les CBC (Canadian Born Chineese). Autrement dit, des Chinois qui ont grandi dans les trois pays que vous avez reconnus, et qui ne parlent parfois ni le mandarin, ni le cantonais. Mais à quoi ça sert ? Tout le monde parle anglais et il n’y a rien de plus normal qu’un chinois qui vous speak avec un accent de vieille dame patronnesse de Notting Hill.

 

La journée (journey comme on dit à Hong Kong) est donc terminée. Mais je sens que je n’ai pas fini de la revivre…

 

Si vous pensez qu'il y a plus de fous que de riz cantonais, si vous êtes un FBC qui regarde la BBC ou si vous avez une autre idée pour terminer cette dernière chronique, vous pouvez m’écrire. Mon adresse est sur cette page.

 

 

Chaque dimanche, les femmes de ménage philippines envahissent les rues de Hong Kong. C'est leur jour de congé et elles le passent entre elles sur des nappes, dans la joie et la bonne humeur. Ces femmes quittent maris et enfants pour 10, 20 ans ou plus. Elles ne les revoient souvent qu'une fois par an et leur envoient une partie de leurs 350 euros mensuel.

 

 

Hong Kong, ce sont aussi de jolies plages. Une façon agréable de terminer le voyage. 

23h45, vue sur Hong Kong Island. C'est devant ce paysage que se terminent mes trois mois de vélo à travers la Chine. Une jolie récompense !

 

 

La grande étape avant Hong Kong fut Canton. J'y suis accueilli chez Vincent qui me fait visiter son immense cité. Nous marchons ici sur la petite île que se partageaient les Français et les Anglais quand Canton était pour nous un comptoir de commerce. 

 

Je passe aussi beaucoup de temps avec Catol que j'ai rebaptisé Delphine. Elle a un petit ami depuis un mois et hier, pour la première fois, il l'a embrassé sur les lèvres. Il avait demandé de sortir avec elle par SMS. C'est quelque chose de très courant ici. Le meilleur moyen de ne pas perdre la face !

 

 

Les rues de Hong Kong. ça ne rigole pas beaucoup. 

 

 

J'ai pu assister au mariage d'une Chinoise. Certes, c'était un mariage catholique, donc je n'ai pas appris grand chose sur les traditions locales. Mais le moment fut quand même agréable. 

 

La vue de mon immeuble. Pas mal du tout ! Merci Sylvain pour ton accueil !

 

Petit tour en bateau avec le même Sylvain et une amie à lui, Violette. Une charmante femme qui comme beaucoup de hongkongais, a fait la plupart de ses études à l'étranger (à Singapour et en Nouvelle-Zélande).

La Chine aboie, la caravane passe (20 août 2006) :

C'est l’heure chaude, je dors assis sur mon siège, tandis que le restau se vide peu à peu. Quand il n’y a plus que moi, un serveur éteint la clim’. Faudrait pas se ruiner pour un repas à 2 euros. Un couple entre soudain avec une fille de 21 ans. Originaire de Pékin, cette dernière cause l’Anglish. On remet la clim’. Ça fait deux raisons de plus d’être heureux. Elle fait ses études de droit dans la région, entre Chengdu et Kunming. Il lui a fallu six mois avant de comprendre le chinois du coin. Une histoire de tons m’échappe un peu. Aujourd'hui, elle pige tout ce que les locaux disent et joue l’interprète pour son oncle et sa tante, ce couple qui me propose de prendre un peu de leur soupe. « Ça ne m’amuse pas, mais je suis bien obligée de le faire puisque c'est ma famille ! ». Autant que vous le sachiez, j’ai renoncé à parler le chinois couramment. Je ne manque pas de phosphore (vous le savez, c'est impressionnant), mais quand on est nomade, on ne peut pas apprendre cette langue ! Les quelques notions que je maîtrise ne fonctionnent pas toujours d’une région à l’autre, alors c'en est trop, j’ai fermé ma méthode et j’apprends à l’arrach’. Ce chinois sans ambitions me suffit au jour le jour. Ça suffit à faire illusion parfois. Hier par exemple, une charmante réceptionniste avec qui je lavais mon linge me demande : « Pourquoi est-ce vous parlez chinois et pas votre copain ? ». Ça fait plaisir, c'est vrai.

Le copain en question, c'est Bidi (qui se débrouille d'ailleurs plutôt bien en chinois). L’ancien webmaster du site est passé de l’autre côté de l’écran. Le voilà qui pédale près de moi quelques jours. À l’heure où vous lisez ces lignes, il est déjà rentré, mais il a eu le temps d’assister à un spectacle particulier dans un village de la minorité Gejia, près de Guiyang. Un chien mort placé sur un piquet. On l’entoure de paille et hop !, ce n'est plus qu'un feu de braise. La nuit tombe sur la rizière. Les femmes au loin nous regardent, vêtues du chapeau propre à cette minorité (voir photos). Des billets commencent à circuler entre les hommes afin d’acheter des bouts de ce qui va bientôt devenir un ragoût peu ragoûtant pour nous, pauvres occidentaux.

Je rejoins quelques heures plus tard des villageois dans leur maison. Une dizaine d’invités attendent le plat qui mijote. On me propose de goûter, bien sûr. J’y vais, j’y vais pas ? La barrière psychologique est importante, mais j’essaie d’en faire fis… C'est pas plus mignon qu'un agneau, un chien finalement ? Un petit bout de côtelette, un petit bout de foie… Franchement, c'est plutôt bon. Le foie a un goût de foie et la côtelette de mouton, en un peu moins tendre.

De villes en villages, je poursuis donc ma route. Un peu fatigué, c'est vrai par ce beau voyage. Kunming fut également marquée par de très belles rencontres. Justin, Valérie, Johanna qui rêvent tous les trois de partir au Canada. Pour l’argent, pour leurs enfants ou pour vivre eux-aussi une belle aventure. Merci à eux pour leur gentillesse. Nos longues heures de conversations furent passionnantes (pour moi du moins).

Si vous aussi, vous aimez les animaux, si vous avez encore un peu d’énergie malgré la chaleur ambiante, si vous aimez notre nouvelle forumancière ou pour tout autre raison, vous pouvez m'écrire. Mon adresse est sur cette page.   

Dans une petite ville, nous rencontrons un super prof d'anglais.
 On s'improvise profs à notre tour devant des classes de 70 élèves.
 On est dimanche matin, mais notre cours commence à 7h30. 
La ville est minuscule et il n'y a que 200 profs dans le lycée.
 Ici, je signe les autographes.

 

 

Et oui, les paysages ne sont pas mal du tout !

 

 

Des rizières à perte de vue. On n'est pas très loin de Guiyang, mais vu que la carte du site ne marche pas, j'évite de vous embêter avec des noms de villes trop petites…

 

 

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Justin devant notre festin. Sa femme et lui rêvent de partir au Canada. Il travaille dans le secteur de l’eau et elle est prof d’anglais. Un vieux rêve d’enfance qui pourrait devenir réalité.

 

Valérie parle un très bon Français. Elle s'occupe du département vente d'un très grand hôtel de Kunming et espère elle aussi faire sa vie l'an prochain au Canada. 

 

Son amie également. Avec sa politique d'immigration draconienne, notre pays n'attire pas, même les jeunes diplômés. Dommage pour nous !

 

Dans le Yunnan, on fait un tour à Lijiang pour rencontrer la minorité Naxi. On tombe sur un endroit super touristique. Voilà des touristes déguisées en Naxi.

 

Une touriste pose avec moi devant Mao. Un jour, mon site internet sera aussi étrange que moi…

 

Bidi se fait tirer par un tracteur. Un peu facile, non ?

 

La table électrique de ma-jong est un véritable succès en Chine. Plus besoin de mélanger et de distribuer les dominos. Tout se fait automatiquement.

  

Évidement, on attise la curiosité des autres élèves.

 

Notre prof d'anglais à droite. Et à gauche, un biker coréen qui fait le tour du monde.

 

Les femmes de Matang ont de jolis chapeaux

 

 

Et les hommes adorent faire cuir les chiens.

 

Allez, un bout de foie pour la route ?

 

 

 

Séance photo avec Bidi. Étrange ce site, non ?

En attendant que tout s'écroule (05 août 2006):

Barnabé a quitté Chengdu, sa ville natale, entre 2000 et 2004. Avant de partir, il circulait déjà sur son petit vélo, se repérant aux maisons, aux immeubles, etc.

Barnabé fait le singe sur sa bicyclette.

Et voici qu'à son retour, ce trentenaire était comme une abeille sans capteurs sensoriels. Il tournait à gauche trop tôt, s’embarquait dans la mauvaise rue, etc. Tous ses repères avaient été détruits pendant son absence : les vieux bâtiments à deux étages, remplacés par des immeubles ultra-modernes, etc…

Il décide de m’emmener dans un des anciens quartier du Chengdu de sa « jeunesse ». Dans une rue étroite, des dizaines de Chinois mangent aux terrasses de restaurants insalubres, assis sur des chaises en bambou (la spécialité locale) ou regarde une série télé torse-nu dans un silence religieux... « En détruisant les habitations comme celles-ci, on a aussi détruit le mode de vie qui allait avec. Quatre ou cinq famille pouvaient vivre réunies autour de la même cours. Il y avait une vie communautaire. Regarde, là les gens jouent au ma-jong… Dans un immeuble où l’on est tous empilés, c'est plus difficile à organiser ! Un proverbe chinois dit que les proches voisins sont plus importants que la famille éloignée… Maintenant, on vit les uns au-dessus des autres, sans connaître son voisin de palier » regrette-t-il.

Dans le vieux Chengdu, on s’assoit sur des bambous en attendant les bulldozers. La destruction des vieux quartiers est aussi de mise à Kunming ou à Pékin. Sans doute un jour les Chinois le regretteront-ils.

Tôt ou tard, cette rue sera passée au bulldozer et ses habitants relogés on ne sait où. « Mais les Chinois, regrettent-ils ces quartiers ?», je demande. « Non, les médias leurs disent que les relogements se passent bien, que cela permet à la ville d’avancer, etc. Ils ont l’impression que l’on va vers le progrès. Mais la Chine se retrouve avec mille villes aux visages identiques ».

Un constat que je peux confirmer après ma traversée du pays ! Je me laisse moins happé par le charme de ces villes dont ni les magasins, ni les temples ne désemplissent. Chengdu garde un certain charme, grâce notamment aux milles canaux qui la traversent, mais je ne me laisse pas happé par son rythme. Ce qui me motive à présent plus que jamais, ce sont mes guides d’une soirée ou de quelques jours. Ce sont eux qui me font vivre ces villes en me révélant ce qu'elles sont pour eux… Barnabé était un accompagnateur de premier choix. Et c'est lui qui m’a aiguillé vers une amie à lui, que je ne suis pas non plus près d’oublier.

La ville et la campagne ne semblent pas être issues d’un même pays. Vous l’avez constaté au cours de mes chroniques, les villes sont celles de pays développés et les campagnes celle de pays du tiers-monde. Jenny vit de plein fouet ces contradictions. Fille de paysans, elle est la grande fierté de sa famille car grâce à ses excellentes notes au lycée, privilège rare, elle a pu décrocher le droit d’étudier en ville. La trentaine passée, assistante dans une petite entreprise, elle ne sera jamais une citadine futile comme les autres. Elle garde en elle ses racines et vit écartelée entre ces deux réalités. D’un côté sa mère, qu’elle entretient mais qui veut encore, malgré ses 70 ans, vendre ses légumes sur le marché pour quelques yuans. Et de l’autre, la ville et ses futilités, où les yuans partent par dizaines au moindre Mc Do… Intelligente et alerte, c'est une femme magnifique.

Jenny rayonne

Si vous souhaitez faire passer votre ville au bulldozer, si vous avez des légumes à me proposer pour mon retour ou pour tout autre raison, n’hésitez pas à m’écrire. Mon adresse est sur cette page.

Je suis arrivé dans le Yunnan. Les gens sourient un peu plus, ça fait plaisir.

 

 

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40 kilos de bambous par jour. C'est ce qu'avalent les grands pandas, espèce en voie de disparition que les Chinois essaient de sauver. C'est une des grandes attractions touristiques de la région.

Les immeubles ont été construits derrière les habitations traditionnelles. Quand celles-ci seront rasées, on aura une belle rue bien large !

 

Pas besoin de se payer une consultation chez un éminent dentiste pour les soins dentaires les plus courants. À méditer ?

Leshan. Le plus grand Bouddha du monde. En arrière plan, les touristes vous donnent une idée de l’échelle !

Dans une famille de paysan pour la nuit. Ça fait plaisir parfois de ne pas trouver d’hôtel. La communication sera limitée, mais la soirée chaleureuse.

 

Escorté par les flics sur une autre autoroute. Direction la sortie et du coup, je fais un méga détour. C'est la première fois que je me fais renvoyer de l’autoroute. Pas d’amende, ça se passe dans une certaine bonne ambiance.

 

Charmante fille des proprios de l’hôtel. Elle a 20 ans mais ne peut plus travailler dans son usine à cause d’une Hépatite. Dans sa minuscule ville, elle rêve de chanteurs et de châteaux…

 

 

Je termine en mangeant avec les ouvriers de la super autoroute en construction (à terminer avant les JO de 2008). Ils sont adorables et la soirée est superbe dans cet endroit reculé du monde. J’ai vraiment eu de belles rencontres entre Chengdu et Kunming.

 

 

Route abominable. Au bout d’une dizaine de borne je décide de m’arrêter.

 

 

Yuan Jin avec qui je visite un parc de chutes d’eaux à Zhaotong, dans le Yunnan. Étudiante en droit à Pékin, elle vient retrouver sa famille pour les vacances. En arrière plan, les cousins ! C'est aussi une fille intelligente et intéressante.

 

 

L’autoroute est là-haut. Je me casse la gueule en essayant de grimper.

Les cheveux des chinois (20 juillet 2006):

Qui a dit qu'on ne pouvait pas découvrir un pays en le traversant par l’autoroute ? Au péage, évidemment, je dois ruser. Les employés me courent après et je croise les doigts pour qu’une voiture de police ne vienne pas me sortir de là par la peau du cou, avec une amende en prime. Mais c'est dans les tunnels noirs comme les cheveux des Chinois, que je n’en mène pas plus large que la bande d’arrêt d’urgence d’une cinquantaine de centimètres. Le bruit des camions qui arrivent à toute berzingue derrière-moi rappelle celui d’un avion qui décolle. « Pourvu qu'ils me voient ».

Mais je franchis ainsi des montagnes sans gravir cols. De temps en temps, un petit chemin, un grillage découpé… L’autoroute communique de manière informelle avec le village qu'elle écrase. J’en profite pour descendre chercher une petite boutique pour me faire chauffer mes nouilles. Et voilà comment on se retrouve dans les coins les plus isolés du pays. Là où, ironie du sort, il n’y a pas toujours de goudron sur les chemins. Les cultivateurs de maïs ou de champignons s’éventent, les commerçants jouent leur argent aux cartes et je m’endors au son du ventilateur et d’une télé.

Je suis devenu une vraie fontaine. L’humidité est telle qu’au moindre effort, je suis trempé et épuisé. Dans les vapeurs matinales, je prends la route vers 7 heures, mais déjà la chaleur est suffocante. À 10 heures, le soleil tape et ne faiblira pas avant 17 heures.

Mais l’autoroute, c'est quand tout va bien. Le reste du temps, ce sont des cols de plus de 3000 mètres sur des routes raides comme les cheveux des Chinois. Plus je monte, plus le moral descend. Pourquoi ne suis-je pas en vacance ?

Parce que malgré tout, cet effort pour être « là où personne ne part » me livre quelques récompenses. Des baignades avec les jeunes issus de villages de montagnes les plus pauvres. Ceux-là qui font des études dans la capitale régionale et qui prouvent que l’ascenseur social chinois fonctionne. Des repas partagés avec des familles endimanchés, le long des cours d’eau, au milieu d’une végétation tropicale.

Avec des profs d’anglais de Hangzong, je bois un Cabarnet-Sauvignon chinois, servi dans une cruche de glaçons, avec des tranches d’oranges. Une petite canette de Sprite servie avec la bouteille permet à ceux qui le veulent, de se faire un audacieux mélange... Programmation informatique, cours de chinois, Internet… Ces Nord-Américains n’ont pas encore 25 ans et veulent continuer à vivre ici au moins un an. Ce sont les seuls étrangers de cette ville qui me semble ennuyeuse à mourir. Je m’en étonne. « Tu sais, me répond l’un d’eux, où que tu sois dans le monde, tu finiras toujours assis dans un bar, à te dire qu’il n’y a rien à faire là où tu es ». Il a raison le bougre, et notre repas m’a fait chaud au cœur (Thanks dude !). (Cette dernière parenthèse était un message personnel, vous l’avez compris, tout comme quand je dis que « Alex the policeman is an asshole ». Oui, je ne vous détaille pas mes problèmes de visas ici).

Et à Myanyang, ville plutôt importante au nord de Chengdu, je vis au rythme cette fois de quelques jeunes chinois. On m’invite à manger une fondue locale, puis nous louons comme des centaines d’autres une paillasse pour se poser sur l’herbe, le long du fleuve. Cartable Adidas, débardeur, portable collé à l’oreille, mon hôte ne parle rien de compréhensible pour moi. Le courant passe pourtant avec ce beau jeune homme et ses deux collocs. Ils débordent de gentillesse et en crachant mes pépins de pastèque, au milieu de ces milliers d’inconnus, je me dis que ma vie est somme toute formidable. 

Si vous faites partie de ceux qui se connectent encore sur ce site malgré la torpeur estivale, si vous souhaitez signer ma pétition pour l’élargissement des tunnels autoroutiers, si une goutte de Sprite dans votre rouge ne nous dérange pas, ou pour toute autre raison, vous pouvez m’écrire. Mon adresse est sur cette page.

 

 

Dans un bruit assourdissant, cet homme propose des criquets enfermés 
dans une petite cage en bois. Les passants semblent aussi intrigués que moi. 
Ils repartent avec leur bête en s’assurant qu'il fait bien autant de bruit que les autres.

 

Les villes qui poussent au milieu de nulle part.

 

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On the road…

 

Ce soir je dors sous un porche, dans un minuscule village, pas loin de l’autoroute.

 

Baignade à l’heure chaude pour se refroidir...

 

Dans un petit village, cet homme fabrique les maisons en papiers qui seront brûlées pendant les enterrements. Drôle de travail, non, de s’appliquer pour voir son œuvre partir en fumée ?!

 

Dans les vapeurs matinales, la chaleur est déjà atroce et je suis en nage en quelques minutes.

 

Ce matin, mes côtes se font sur une route particulièrement mauvaise.

 

Après d’atroces souffrances, je me retrouve dans un lieu super touristique. Un hôtel propose des nuits dans des yourtes…

 

Climatisées, avec la télé, et tout et tout. Pour me faire plaisir, le patron ne fait payer que 10 % du prix ! La nuit sera parfaite !

 

Un jeune anglophone s’amuse à faire le singe sur notre photo souvenir.

 

Coup de déprime quand je me retrouve face à ce relief… Les heures à venir promettent d’être dures.

 

Mianyang, autour de notre fondue. Au menu, des bouts de poulets trempés dans une sauce super épicée.

 

Mon environnement quotidien.

Dire oui aux noms (13 juillet 2006) :

Je m’appelle Fang Si Yuan. Mettez-y les bons tons s'il vous plaît, j’ai horreur que l’on écorche mon blase. Fang, ne cherchez pas, c'est mon nom de famille, il n’y a pas de sens à trouver. « Si » veut dire « penser à » et « Yuan », « distance ». Donc en gros, je suis celui qui pense au voyage. J'ai du mal à trouver un prénom français à ma voisine de table qui vient de me baptiser. Xi Yu (pluie), ça se rapproche de quoi, sachant que Xiµ se prononcer « Chia » ? Ça court pas rues les prénoms qui commencent comme ça ! J’opte pour Charlotte.

Déjà que j’ai pas la mémoire des prénoms, alors sans ce système de double immatriculation, il faudrait que j’appelle tout le monde « machin ». Tandis que là, c'est simple pour tout le monde. Tenez, si je vous dit Alvin par exemple, vous retiendrez mieux que Chu Jaï Jouï, non ? Ce Chinois de nationalité Singapourienne parle mieux anglais que moi. C'est rare de se faire des amis, mais en quittant Xian, j’ai l’impression d’en laisser un derrière moi. On a encore des bleus sur les cuisses tellement on se les ait tapées fort dans les petits restaus, loin du Xian touristique, ou dans les rues branchées de l’ancienne capitale chinoise. Tantôt un peu grivois, tantôt intarissable sur les fondements de la culture chinoise, on aurait pu encore parler des jours ensemble ! Il m’a présenté tous ces amis ayant quelques notions d’anglais. La petite Natacha par exemple. C'est moi qui l’ai baptisé de ce prénom incongru, par pur plaisir. Originaire du Xinjiang, la région où j’ai commencé mon périple, elle espère ne plus y retourner. Je vous l’ai dit, Urumqi est vue comme une ville paumée en Chine. Elle a pu venir faire ses études de gestion à Xian et ne rêve plus que de villes à sa hauteur. Elle espère l’eldorado Shanghai un jour ! Elle est Hui, ce « peuple » disséminé dans tout l’Empire, qui ne se distingue de la majorité Han que par sa religion, l’islam. Mais elle « ne croit en rien ». Elle se contente de ne pas manger de porc, par tradition. « On ne nous dit jamais ouvertement de ne pas « croire en Dieu », explique-elle en versant la tête d’un beau poisson dans notre plat à fondu dont la forme symbolise le yin et le yang. À l’école et à la fac, on nous dit simplement « de ne pas succomber aux superstitions ». Mais entre nous, la religion et les croyances ne sont vraiment pas un sujet de conversation ».

Toujours très consciencieux, je ne quitte pas la table sans avoir sorti les lamelles de mouton et de bœuf du plat et sans m’être renseigné sur les rêves amoureux des unes et des autres. J'ai le regret de vous dire que cette chronique ne me laisserait pas assez de place pour les détailler. D’autant que tout cela est complété par le travail de long terme qu’a effectué Alvin, le bon ami confident de ces dames. Sa belle sensibilité lui amène plein d’amies filles. Lui qui a débarqué ici il y a seulement 7 mois, a réussi grâce à son intelligence, son humour et sa sensibilité, à devenir quelqu'un de précieux pour beaucoup de personnes !

Je ne terminerai pas cette chronique sans évoquer mon passage dans ce que la jeunesse chinoise considère comme un des hauts lieux de la fiesta, un K-TV. Nous voilà enfermés dans une petite salle avec canapé, table basse, télé grand-écran et moniteur de contrôle. On n’a plus qu'à choisir sa chanson, et le massacre peut commencer. Vous comprenez que le K veut dire karaoké. Ça dure des heures et on y passe donc ses soirées ou ses week-ends. Mais ce que j’y ai préféré, c'est le buffet à volonté compris dans le prix d’entrée !

Si ne trouvez que je parle trop des soldats en terre cuite du mausolée de Qin Shihuangdi, si vous voulez vous aussi baptiser un Chinois contre l’achat de 14,99 kilomètres (il n'est pas trop tard pour acheter des kilomètres les amis, alors allez-y, ne vous gênez pas !), si vous êtes seul à travailler et que ces chroniques vous font du bien ou pour tout autre raison, vous pouvez m’écrire. Mon adresse est sur cette page.

Place centrale de Xian, la tour du tambour.

 

Les fameux guerriers en terre cuite. Durant toute sa vie,
l’empereur Qin Shihuangdi a fait construire son mausolée.

 

Dans la grande mosquée de Xian, les caractères arabes 
peuvent faire penser à des caractères chinois…

 

Quelle bonne surprise l’on a en remuant sa soupe !

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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Mon ami Alvin sur sa bicyclette électrique

 

Une petite fondue en tête à tête avec Alvin

 

Claire et Natacha, deux autres amies d’Alvin, pour une autre fondue

 

Dans le K-TV

 

Et voilà qu’une vingtaine de kilomètres après Xian, j’aperçois dans la brume les montagnes que je dois affronter. Violent !

 

Heureusement, les forces du bouddhisme veillent sur moi.

 

Nous sommes dimanche et les montagnes sont remplies d’habitants de Xian, venus ici pour se reposer.

 

Tout en haut de mon premier col, après plus de trois heures de montée, les touristes m’acclament ! Mon nouveau T-shirt évite que l’on perçoive mes traces de transpiration.

 

La vue de tout là-haut. L’air est extrêmement humide et j’ai l’impression de pédaler dans un sauna.

 

Même dans les petits villages, on adore les chiens. Les Chinois sont un peu choqués quand je leur demande s’ils aiment aussi les manger. Certains le font, oui (la Chine est tellement immense), mais la plupart ont la même réaction que nous autres, les Occidentaux.

 

Maintenant quand on me prend en photo, moi aussi je prends en photo. Ici dans un petit village touristique, à trois jours de Xian.

 

Si vous étiez un peu plus attentifs, vous remarqueriez que c'est une sacrée côte qui m’attend !

 

La chaîne de mon nouveau vélo a tendance à se coincer… Heureusement, j’ai la dream-team réunie pour me filer un coup de main.

 

Je ne fais plus que monter et descendre dans une ambiance de sauna… Est-ce le nouveau vélo plus lourd, la fatigue, ce relief, ce climat… Finies les grosses journées. Ces derniers jours je tournais autour de 75 kilomètres par jours.

 

Photos d’identité pour prolonger mon visa. On me met de fausses lunettes sans verre et on me poudre le nez. Souriez !

 

Et si on notait nous aussi les employés de la banque ou de la Poste ?

Bénie soit la chine (11 juillet 2006) :

Nous mangeons tranquillement nos nouilles maisons, servies froides avec des bouts de pain de mie et du vinaigre. Repas à 0,2 euros. En discutant avec ces deux étudiants de Lanzhou, je m’aperçois que les trois jours de collines entre leur ville et Tianshui (que j’ai montées avant de me faire voler ma monture à Xian), marquent une frontière… Les deux amoureux ont en effet toutes les peines du monde à comprendre le chinois local. Les mots sont les mêmes, mais les tons sont différents. Ça ne change pas grand chose pour moi. On ne me comprend guère mieux.

Quelle ne fut pas ma surprise durant cette traversée, lorsque je vis une affiche de Jésus himself (oui, notre Jésus !) sur le mur d’une commerçante. Celle-ci s’est convertie au protestantisme il y a huit ans. Et tout le foyer y est passé. Nous sommes pourtant dans un tout petit village de Chine… C'est une amie à elle qui lui a fait découvrir cette religion.

C'est souvent à Noël que les Chinois font leurs premiers pas dans les églises. La fête s’impose peu à peu ici et les chinois sont nombreux à vouloir, par curiosité, assister à une messe de Noël. Du coup, Catholiques et Protestants mettent les plats dans les grands en espérant recruter de nouvelles ouailles.

La jeune fille qui absorbe une nouille en face de moi m’explique que beaucoup d’étudiants de Lanzhou célèbrent des messes clandestines, en dehors des églises officiellement reconnues par les autorités. Elle est elle-même protestante depuis quelques années. Son rêve : se marier un jour à l’église. J’imagine que le folklore de la belle robe blanche devant le curé ne doit pas y être pour rien dans toutes ces vocations.

Les deux tourtereaux d’une petite vingtaine d’années ne sont ensemble que depuis 40 jours. Ils sont leurs premiers amants respectifs et espèrent bien être les derniers ! Quand on sort avec quelqu'un, ici, c'est du sérieux !

Si vous envisagez un mariage bouddhiste, si vous savez faire les pâtes maisons, si vous aimez Noël ou souhaitez accrocher une affiche de Mao dans votre commerce, ou pour toute autre raison, vous pouvez m’écrire. Mon adresse est sur cette page.

Première côte pour sortir de Tianshui. La route est toute défoncée. Je découvre par la suite que pour la seconde fois en quelques jours, je me suis trompé de route. Un détour d’une cinquantaine de kilomètres dans les montagnes sur une route pourrie, ce n’est pas rien !

 

 

Les derniers kilomètres avant l’arrivée à Xian sont plats. Mais on peut voir l’humidité ambiante ! J’ai l’impression de pédaler dans un sauna, c’est bien dur !

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Cette route de montagne est tantôt une piste caillouteuse, tantôt en travaux. Le goudron pas encore séché se colle à mes pneus. Je ne risque pas de crever ! En revanche, je reçois toute la journée des éclaboussures de goudron, c’est insupportable.

 

Euh... Je passe où moi ?

 

Église protestante de Lanzhou. Au premier plan, une petite pancarte indique que les toilettes donnent sur la salle principale !

 

Petite église dans un village

 

Mes deux étudiants. Protestante depuis peu, elle rêve d’un mariage dans une église ! Peut-être avec ce jeune homme !

 

Je les ais rencontrés à Tianshui, où l’on peut voir de superbes bouddhas gravés sur une falaise.

 

Ce que j’aime bien en Chine, c’est que les conventions pour poser sur les photos ne sont pas du tout les mêmes que chez nous !

 

Affiche pour encourager les Chinois à ne plus cracher (enfin, je suppose)

L'envol du vélo (4 juillet 2006) :

 

Il était attaché à un poteau. Quelques heures plus tard, le poteau était toujours là, mais plus le vélo.

Il m’avait déjà fait quelques envols. Les trois jours qui m’ont amené à Tianshui, capitale du Gansu oriental, furent une traversée de collines à perte de vue, ciselées par des cultures en terrasses. Beaucoup de côtes, mais qu'importe, j’avais l’impression de voler sur mon tapis à deux-roues.

Je me trompe de route le second jour. En fin d’après-midi, un homme charmant m’apprend que j’ai tout intérêt à retourner d’où je viens, c'est-à-dire à 90 kilomètres de là. Je m’exécute, le moral au niveau de mes pédales, ne voulant pas m’enfoncer pour rien dans ces collines, aussi jolies soient-elles. Deux cyclistes me confirment que Tianshui est bien dans l’autre sens, mais deux routiers sur le bord de la route un peu plus loin, me rassurent. Ouf, j’allais dans la bonne direction, même si j’ai fait un petit détour.

Enfin, je classe le dernier jour dans mes annales personnelles. Je suis passé de 100/110 kilomètres quotidiens à 140. J’espère ne plus avoir à le refaire ! D’autant que la journée fut marquée par un col matinal (5 kilomètres et une demi-heure) et un autre au moment le plus chaud de la journée (1h30 pour en venir à bout !). Par quel miracle, la route allait-elle toujours plus haut, même quand objectivement, on ne pouvait pas aller plus haut ? Je volais à nouveau, mais à la force de mes jambes ! Lors de mon arrivée à Tianshui, le beau blond s’était couché.

Et me voilà perplexe devant mon poteau. Une dame m’invite à me rendre derrière un bâtiment bizarre juste à côté. J’y trouve la bête cadenassée et entourée de condés. Ce sont eux qui m’ont forcé mon super cadenas parce qu'il est interdit de se garer aux poteaux de la ville. On ne doit même pas les attacher à quelque-chose. Ils doivent nous attendre au milieu de parkings, la roue-arrière bloquée !

Quand j’ai demandé à ces personnes en uniforme comment ils comptaient me rembourser mon cadenas, ils ont évoqué l’amende qu’ils allaient me faire payer. Je n’ai pas insisté et j’ai acheté le seul cadenas du marché local. Un truc un peu ridicule.

Mais bon, je dois dire que les flics ont toujours été plutôt sympas avec moi jusque-là. Ils ne m’arrêtent jamais quand je brûle des feux rouges, roule au mauvais endroit, ni même quand je les croise au milieu d’un col quand je suis à l’intérieur d’un virage à contre-sens… Je les quitte sans rancune, en me disant que si tout le monde attachait son vélo à des poteaux, il n’y aura plus de poteaux libres en Chine.

Mais voilà qu'hier à Xian, je revis une aventure semblable. Je ne trouve pas de parking à vélo et je l’accroche à une barrière. Cette fois, l’envol est définitif malgré les gros efforts que me promet la police de Xian. J'ai le cœur lourd, comme si l’on m’avait volé un bout de moi. A côté de mon emplacement vide, un môme, une femme et un ventru forcent un autre cadenas. Je les prend pour la « fourrière à vélo ». Ils m’assurent ne pas avoir touché au mien, mais il s’agissait bien de voleurs (de braves types par ailleurs !). Je m’en veux, j’en veux à la police de m’avoir forcé mon bon cadenas, j’en veux à Xian. Mais relevons la tête. Ce n'est qu'un vélo.

Une des mes côtes matinales

 

 

Une de mes côtes de l’après-midi

 

 

Une de mes côtes du soir

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La journée se déroule dans un environnement magique ! Canyons...

 

Cultures en terrasses... Quel plaisir d’être ici !

 

Mon premier tunnel. Aucun éclairage, je me retrouve vite dans un noir complet. C’est très impressionnant de ne pas savoir du tout sur quoi l’on roule ! Mais qu’est-ce qu’il fait bon la dedans ! J’y passerais presque mes journées !

 

Aujourd’hui, pas de restau dans le village où je me pose. Je me chauffe des nouilles chez ce charmant commercant. Il me pretera son lit pour piquer un somme.

 

C’est la saison des blés... Pendant une vingtaine de kilomètres, je dois rouler dessus ! Les voitures aussi. Cela permet aux paysans d’aplatir leur récolte ! Ce n’est pas génial pour moi car ça me ralentit et je manque de rentrer dans les paysans qui labourent la route à chaque fois. Mais l’odeur est agréable !

 

Cérémonial d’enterrement sur ma route. On va brûler un cheval qui aidera le défunt dans l’autre monde. Parfois, on lui brûle aussi une voiture (en papier bien sûr) !

 

Ce que j’aime bien en chine, c’est que quand on a chaud, on peut mettre son ventre à l’air.

 

Partie de dominos dans mon hôtel du soir. Il semble en effet que le jeu soit originaire de Chine. Mais ici, leurs parties sont plus proches du rami que de notre jeu.

 

Ce soir dans mon restau, vue sur le Panthéon

 

Pour atteindre Xian, la route est en très mauvais état. J’ai mal aux fesses !

 

Je roule jusque 19h30 ou 20 heures. Les agricultures quittent leurs champs.

Autour d'un bon yack (25 juin 2006) :

Je le regarde dans les yeux. Nous avons 30 ans tous les deux et des vies si différentes. Depuis qu'il est gosse, ce moine tout en rondeurs consacre sa vie à l’étude des textes bouddhistes. Nous sommes dans un restaurant de Xiahé, juste à côté d’un temple tibétain de 1200 moines. On les voit donc qui déambulent dans leurs tuniques rouges partout dans la petite ville, les gamins jouant à des jeux de guerre dans les cybercafés et les adultes sortant régulièrement un portable d’un pli de leur habit.

Ils n’ont parfois que dix ans quand leurs parents décident de les envoyer ici. Un moyen de marquer son attachement à sa culture, mais aussi de les faire nourrir et éduquer gratos. Ils peuvent renoncer à la vie monacale (du moins quand ils sont en age de prendre leur vie en main), mais c'est de manière définitive. Mon moine n’en a pas envie. Pas de perspectives très réjouissantes pour lui sans autre bagage que celui d’étude de la philosophie bouddhiste. Il me dit la misère des nomades dans les montagnes, des troupeaux de yacks décimés par l’hiver, des enfants sans éducation, etc. « Mais si tu étais sûr d’avoir de l’argent, est-ce que tu quitterais le monastère ? ». Trop difficile de répondre.

Ici en ville, les enfants sont éduqués. Ils peuvent apprendre le tibétain et partagent leurs écoles avec les Hans (l’ethnie majoritaire chinoise) et les Huis (musulmans). Les touristes sont nombreux (beaucoup de Chinois Hans viennent voir ce temple tibétain) et les conditions de vie plutôt bonnes.

Dans les temples, on a disposé des photos d’un gamin, le pan-chen lama (le second du dalaï-lama) que Pékin a désigné. C'est pourtant un autre enfant que le dalaï-lama (exilé en Inde) a reconnu comme sa réincarnation (car ces messieurs se ré-incarnent et des gamins apprennent de temps en temps qu'ils ne sont « que » la réincarnation de tel ou tel grand lama). Il fut aussitôt kidnappé et mis en résidence surveillée par le gouvernement chinois. Les moines ignorent les photos du pan-chen lama désigné par Pékin. « Non, je n’ai pas vu cette photo, ironise un moine. En tous les cas, je ne l’ai pas chez moi ».

La sphère privée ne correspond pas à la vitrine que sont les temples. Après avoir terminé sa soupe au yack (il ne tue pas d’animaux, mais en mange volontiers), mon moine (dont je vous tais le nom volontairement), m’amène chez lui. J’y vois les premières photos du dalaï-lama. « Non, on ne risque pas grand chose à en avoir chez nous. Il y a peu de chances que les autorités viennent dans nos maisons et c'est moins grave que d’avoir ses livres, qui de toutes les façons sont très difficiles à trouver ».

Notre conversation dure plusieurs heures. Leurs croyances, leurs sectes, les Bouddhas, sa vie à lui entre l’Inde, la Chine, le monastère et parfois les prisons… L’espace d’une chronique est bien court. J’espère pouvoir détailler davantage cette rencontre dans le bouquin que je tente d’écrire sur mon aventure !

Si vous aimez manger des cadavres d’animaux, si vous espérez vous réincarner dans un truc bizarre, si vous arrivez à pied par la Chine, si vous avez en tête des éloges ou des insultes, ou pour tout autre raison, vous pouvez m’écrire. Mon adresse est sur cette page.

 

Mais heureusement, l’ultime récompense après d’horribles derniers kilomètres dans une banlieue sans fin… L’arrivée à l’hôtel !

 

Ces deux jeunes amateurs de vélo ont quitté leur bus pour venir à ma rencontre quand j’ai débarqué à Lanzhou. Ça m’a fait chaud au cœur car je dois dire que je me sentais bien seul dans ma journée infernale !

 

Lanzhou, ce sont des grattes-ciels et des montagnes. Un côté assez oppressant !

 

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Les enfants moines restent avant tout des enfants. On s’amuse à loucher…

 

ou on s’amuse dans les cybercafés…

 

Les Tibétains font souvent des offrandes de beurre de yack aux Bouddhas. C'est en cette matière que celui-ci est réalisé.

 

Ce monastère est sur-réaliste et magique, malgré le libre accès aux touristes. Des moines partout, des chants, des odeurs d’encens. Ce temple appartient à la principale secte bouddhiste, celle des Bonnets Jaunes.

 

Des moines, mais aussi des habitants du village font sans cesse le tour du monastère (plus de deux kilomètres) en tournant ses centaines de moulins à prière. Au delà de l’aspect « religieux », ce parcours est aussi sportif ! Les vieilles tibétaines y voient un moyen de faire de l’exercice !

 

Le monastère au cœur de la vallée.

 

L’arrivée jusqu’à Lanzhou, la grande ville du coin ne fut pas une mince affaire. Ce sont pour moi les premiers cols à grimper. J’y vois les premières cultures en terrasse. C'est vraiment la Chine, ça!

 

Quelques kilomètres après avoir forcé un barrage d’autoroute pour éviter une route pourrie, crevaison. Une première puis une deuxième. Ce sera la fin de la journée. J’ai fais une bonne centaine de bornes.

 

De temps en temps, des cyclistes m’accompagne un kilomètre ou plus. C'est sympathique même si mon chinois reste catastrophique. C'est beaucoup plus dur que le russe et cela reste une grande frustration.

 

La dernière journée, 125 kilomètres sous la pluie.

 

Les routes ne sont parfois que gadoue.

Le coquin au Coca (15 juin 2006) :

Pain brioché, poulet panné, salade, une petite sauce sucré à la tomate. Ils appellent ça « hamburger ». Ça marcherait du tonnerre chez nous. Je me bâfre et à côté de moi, deux lycéens épluchent une revue qui détaille les scores de toutes les universités du pays. Je vous présente Xue Feng Yuan. Il ne se fait pas trop de bile car aux examens de fin de lycée, il pense être un des trois premiers de la province, le Gansu. Il pourra donc choisir sa fac de finance, celle de Pékin vous l’aurez deviné !

Profitant de son anglais de premier de la classe, je décide de m’aventurer sur un nouveau terrain, celui des mœurs ! Je suis un peu perdu entre d’un côté les filles gênées que je leur propose de boire un coup (un thé, bien sûr) alors que c'est de leur anglais que je veux abuser, et de l’autre le patron de mon hôtel qui m’indique que la maison-close du deuxième étage m’est grande ouverte.

Xue Feng Yuan m’explique qu'au lycée, on n’a théoriquement pas le droit d’avoir une petite-amie afin de consacrer toute son énergie à ses études. Vous comprenez pourquoi le niveau des écoles de Belleville a augmenté depuis que les Chinois l’ont envahi ! Mais le jeune homme de 18 ans est un fort en thème, alors vous pensez bien que ses parents ont du mal à lui reprocher de ne pas assez bûcher. Il a donc une cops depuis trois ans. Ils déjeunent ou se promènent ensemble le week-end. N’allez pas imaginer des jeux interdits qui ne se joueraient pas à la guitare. « Nous n’y avons pas le droit avant le mariage » m’explique-t-il en aspirant une gorgée de Coca pour masquer sa gêne devant les questions indiscrètes d’un Occidental sans limites (vous avez vu pour quoi je passe afin de vous satisfaire !). Il m’avoue ensuite, avoir déjà embrassé sa douce… mais sur les joues !

Xue Feng Yuan fait partie d’un milieu plutôt privilégié. Son père a son entreprise de ciments. Quant à sa mère, ingénieur dans une grande entreprise du coin, elle a dû quitter son poste. Un beau matin, son boss la convoque : « Nous sommes en sureffectifs, nous devons être plus efficaces. Nous préférons nous séparer des femmes. Cela vous permettra de vous occuper de votre mari et de votre enfant, comme le veut la tradition ». Ainsi, depuis un an, à 40 balaies, tout en faisant quelques investissements en bourse, sa mère le bichonne et prépare ses trois repas quotidiens. Il est bien conscient qu'il lui doit une partie de sa réussite.

De mon côté, j’avance. 250 kilomètres en deux jours. La chaleur est de plus en plus difficile à supporter physiquement. Coups de chaud et estomac qui se détraque de plus en plus. Mais j'ai la satisfaction de faire des kilomètres. Je continue à alterner oasis et déserts. Les premières sont de plus en plus grandes et les seconds de plus en plus petits. Merci de votre attention. Vous pouvez reprendre une activité normale.

 

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Mon copain Xue Feng Yuan

 

Sur la route. Bus transformé en petite cabine pour faire je ne sais quoi.

 

Dans les petits restaus de bords de route, les camionneurs sont mes principaux compagnons.

 

A nouveau des dizaines de ruches sur ma route. Les sales bêtes semblent moins agressives…

 

Mais je prends mes précautions.

 

Zhangye, c'est là où (se) repose le plus grand bouddha couché du pays. 35 mètres de long !

Sur le bord de l'Empire du Milieu :

(13 juin 2006) 

On ne passe pas ses samedis à philosopher sur l’influence du yin sur le cours du yuan, ici. La grandeur de la civilisation chinoise et tout le tralala, on se les met un moment au chaud. C'est samedi, donc pour fêter ça, on passe l’après-midi dans un bon restau avec ses collègues et leurs familles. Les plats trop copieux défilent et les femmes finissent par aller s’aérer dehors avec les enfants. Les mecs se lancent dans des sortes de feuille-ciseaux-cailloux chinois en hurlant. On ne réfléchit pas trop, l’essentiel c'est que le perdant boive. Tout le monde est bourré, le samedi est joyeux.

Au milieu de ce beau monde éméché je regarde d’un œil les pubs pour corsets cachant bourrelets et fesses tombantes. De l’autre œil, je mène un combat contre un agneau. Luttant pour détacher les couches de gras. J’en ai jusqu’aux oreilles, fait un bruit de porc en me brûlant les doigts et m’étonne que mon exhibition moyenâgeuse se fasse dans l’indifférence générale.

Nous sommes dans un des petits restaus du fort de Jiayuguan. Aujourd'hui, l’entrée est gratuite, alors ils sont des centaines (car les Chinois ne savent pas faire dans la demi-mesure) à avoir sorti les ombrelles, les protéges-bras et les casquettes pare-soleil qui couvrent le visage. En fin de journée, ce sera le méga embouteillage entre les voitures, les vélos et toute la panoplie des engins intermédiaires (je vous annonce d’ailleurs la création d’une nouvelle rubrique photos sur le thème du deux-roues. Il y a de quoi faire, je suis surpris tous les jours).

Sous les touristes, le fort. Si les Chinois ont bien des fois étendu leur influence au-delà de Jiayuguan,  ce fort était malgré tout considéré comme « la dernière place forte chinoise ». Donc j’entre pour de bon dans l’Empire du milieu.

Mais la ville est aussi symbolique pour moi, pour une autre raison. Deux mythes se rejoignent ici. Celui de la route de la Soie, et celui de la Grande Muraille. Et oui, les pans les plus à l’Est sont ici. Restauré il y a une quinzaine d’années, je m’amuse à me prendre en photo dessus avec mon vélo. Ça ferait une belle couverture de bouquin, non ?

Je vais maintenant m’engouffrer dans un corridor (montagnes au Nord et au Sud) qui était le passage obligé des grandes caravanes de marchands. Avec ma monture en fer, je devrais longer quelques temps les 2700 kilomètres de la belle muraille.

Si vous vous sentez de commercialiser un concept de feuille-ciseaux-cailloux alcoolisé auprès des Écoles de kiné pour aveugles, si vous trouvez injuste que les vélos chinois paient pour se garer, si vous voulez me faire des louanges ou des reproches, ou pour tout autre raison, vous pouvez m’écrire. Mon adresse est sur cette page.

 

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Le fort est derrière tout le monde. Ce n'est pas samedi tous les jours (par définition), donc on en profite.

 

À l’arrière plan, les montagnes qui marquent le corridor dans lequel je m’engouffre.

 

Ça ressemble à "cailloux", mais en fait ils se jettent un tas de chiffres à la figure… (Cette légende devrait vous paraître incompréhensible si vous n'avez pas lu la chronique...)

 

Et celui qui perd sera un peu plus bourré.

 

Les montagnes sont assez hautes et on pourrait penser qu’elles suffisent à se protéger des barbares du Nord. Mais non, bien avant le coup de la ligne Maginot, les Chinois se sont dit que ça ne suffirait pas.

 

Séance de massage avec un gros chinois aveugle. Rien d’érotique donc. De la tête aux pieds en passant par les oreilles, les arcades sourcilières et les doigts. Je ne peux pas dire que je me sois senti extrêmement relaxé par la séance… Mais ça ne peut pas être mauvais pour la santé.

Quand ça défile (10 juin 2006) :

Je verserais volontiers une larme pour le vieux tireur de pousse-pousse qui trime sur son vélo. Tu parles Charles, la fille qui m’accompagne lui demande de se manier la rondelle… Il vend ses muscles de jambes. Et dire que je vous fais tous mes récits à l’œil. Redressez-vous au moins, s'il vous plaît, quand vous me lisez. C'est plus agréable pour moi, merci.

Le pousse-pousse nous dépose devant les rois de la photo de mariage. Faites vous prendre avec (oui, avec) votre dulcinée, on se charge de faire les déclinaisons : portraits de deux mètres de haut avec cadre en bois 19ème siècle (45 euros), horloge, petite assiette (15 euros), album dans lesquels on mixte toutes les photos en ajoutant des bords de mer, des pianos et des paroles de Lionel Richie (et oui, en anglais, pour 20 euros).

Je ne me suis pas marié avec ma compagne de pousse-pousse, je vous rassure. Je suis venu graver un CD de mes 450 photos. Et voilà qu'elles défilent sur l’écran. Ces déserts, ces oasis, ces yeux bridés ou plissés. Ça fait seulement vingt jours que je pédale. C'est une banalité de le dire, je sais, mais les rapports au temps son totalement chamboulés dans ce genre d’expéditions. J'ai l’impression que c'est une partie importante de ma vie qui se pixélise sur leur écran. Alors que 20 jours devant mon ordi de banlieue, c'est un claquement de doigts (et de claquements en claquements, les années passent, hein ?).

Tenez, ces quatre derniers jours. Ils en valent tellement plus. Si vous saviez par quoi je suis passé, vous auriez le vouvoiement plus facile à mon endroit. D’ailleurs je me vouvoie moi-même. Jour 1 : Route en construction. J’alterne entre la petite piste sur laquelle je mange la poussière des camions qui roulent à toute berzingue et le slalom entre les ouvriers, les graviers et les tas de sables de la nouvelle route. Une soixantaine de kilomètres, pas plus.

Jour 2 : Je sais, les oasis, c'est bon, c'est bon. Mais avec un vent de face, c'est pas bon du tout. Effort permanent, constant. Toute la journée. La lutte. Je vous dis franchement que ça m’énerve de résumer ces jours en quelques lignes. 60 bornes.

Jour 3 : 40 bornes entre la route en construction et la piste. Et l’après midi, oasis. Je trouve une petite route loin de ces travaux. Inconvénient : 20 kilomètres d’un faux plat atroce (deux heures). 110 bornes dans la journée, je m’applaudis, clap clap. Et enfin ce matin, 40 kilomètres, mais je ne m’étends pas dessus et reste modeste.

Voilà pour mes journées. Et pourtant, des photos qui se gravent, je retiens surtout celles qui sourient. J'ai déjà épuisé le temps de ma chronique, tant pis pour vous. Quelques mots sur les deux principales rencontres, tout de même : une nuit dans les faubourgs agricoles. Des Hans qui après leurs journées courbés dans les champs de coton s’occupent de leur basse-cour. Le petit veut faire des études de médecine : « Grâce à moi, mes parents ne seront plus fermiers et je pourrai les soigner quand ils seront malades ». La curiosité de la soirée, c'est moi. Les oncles et les voisins défilent. Jusqu’à 18 dans la pièce ! « Mon rêve était de rencontrer un jour un étranger. Mon rêve s'est réalisé » m’explique le gamin, lycéen à Anxi, une plus grosse ville à 60 kilomètres d’ici. Deux grandes affiches de Mao veillent sur nous. « Il a sauvé notre pays » disent fièrement les paysans.

Le lendemain, au détour d’une route, une grande croix chrétienne me domine. Je sais que c'est là que je dois aller. L’église est en construction. On m’accueille tout de suite avec gentillesse. Mais comme mon corps me crie « Arrête tes conneries. Je suis là pour que tu marches entre domicile et travail, pas pour traverser la Chine à vélo », je suis tout mou, hagard. Et comme en plus, je ne pige que pouic au chinois. Je dois leur faire une drôle d’impression à ces Protestants qui ne protestent pas.

Parfois, les mots ne servent à rien. Wang le sait. Il m’offre de l’eau, me fait marcher tranquillement en ville, m’amène au café internet. Il est plein de petites intentions, de petits gestes précieux. Et c'est ce dont j'ai besoin. Il l’a compris. Je me laisse guider, renonçant à demander comment ils comptent s’y prendre pour attirer les ouailles. Raviolis, fille, femme et mère dans le restaurant de Wang. Je dors comme un sac de farine. Ces belles rencontres valent-elles ces journées si dures ? Sans doute.

Si vous avez un copain garagiste, si vous vous y connaissez en mécanique ou pour tout autre raison, vous pouvez m’écrire. Mon adresse est sur cette page.

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Ouvriers devant mon église de Yumen Zen.

 

Wang, sa femme et sa fille qui fait ses exercices de boulier après l’école.

 

J’inaugure pas mal de tronçons de cette nouvelle autoroute dont les travaux doivent encore durer trois ans. A gauche, la petite piste qu'utilisent les camions. Je dois choisir entre la peste et le choléra !

 

On me tolère sans problème sur cette nouvelle route. C'est à mes risques et périls. Et régulièrement, je dois franchir des fossés un peu comme je peux ...

 

Pour ceux qui se demandent ce que je mange, voici une des bizarreries atterrie dans mon assiette. Manifestement, ce sont des œufs. Mais le blanc est tout transparent. Si quelqu'un peu m’expliquer, RV sur le forum. Je n’ai pas terminé.

 

Mais les plats sont très variés… Vous connaissez les Chinois. On met un tas d’épices et ça rend tout magique. Parfois, je n’ai aucune idée de ce que je mange, mais je me régale. La constante, ce sont les nouilles (des spaghettis épais, dans lesquels on mélange la viande en sauce) et le riz. Ça reste souvent assez gras.

 

Mao veille sur mon copain chinois. Je ne lui ai pas dit que j'ai commencé ce voyage le 40ème anniversaire de la révolution culturelle et que je le termine pour le 30ème anniversaire de la mort du Grand Timonier.

 

En fin de soirée, dans les faubourgs agricoles, on n’étaient plus que dix. Mon hôte ne m’a pas demandé comment j’anticipais un Smic à 1500 euros sur mes dépenses de garagiste, mais si la France était un pays développé.

 

Confortablement installé dans le pousse-pousse en charmante compagnie.

Tiens, voilà du Bouddha (4 juin 2006) :

Il y a une dizaine d’année, je découvrais l’Est de notre Europe. Depuis, je ne cesse d’aller un peu plus loin. Si je comprends le voisin de mon voisin, je peux comprendre son voisin, non ?

Il y a deux ans, au cours de mon périple à vélo Odessa-Tachkent, j’atteignais Samarkand et les étapes les plus mythiques de la route de la Soie. Je ne comprenais pas tout, comme toujours quand on a la tête dans le guidon. Ce sont les deux années suivantes que j’ai pu lire, interviewer, compléter mes connaissances terrains, et même revenir lors de voyages moins ambitieux.  

Aujourd'hui, je suis à nouveau sur mon vélo (ce petit engin destiné à m’obliger à prendre le temps) et à nouveau sur les routes de la Soie. Étape symbolique forte, j'ai atteint sa première ville chinoise, Dunhuang (car comme je vous l’ai expliqué dans les chroniques précédentes, le Xinjiang, où j’étais précédemment, n’est réellement chinois que depuis peu). 

Les marchands chinois, eux, s’en allaient à l’Ouest… C’était donc leur dernière ville chinoise du voyage. Et quoi de plus efficace pour faire de bonnes affaires ? Les offrandes à Bouddha, bien sûr. C'est ainsi qu’à quelques kilomètres de la nouvelle ville, quelques 400 magnifiques grottes ont été édifiées à sa gloire. On y méditait, et les plus riches marchands payaient quelques artistes à s’affairer pendant des semaines à peindre et à sculpter Bouddha et ses acolytes…

Du 4ème au 13ème siècle (ça en fait des bouddhas !), ces grottes de Dunhuang ont vu se succéder un tas d’influences… On y trouve des touches indiennes, mais aussi des dieux chinois (le bouddhisme a dû s’adapter à la culture locale), et même des nus sans doute dessinés par des artistes de l’Ouest et cachés dans les coins les plus sombres des grottes, car cet art n’était pas du tout répandu en Chine ! 

C'est par ma route notamment, que le bouddhisme est arrivé en Chine. Parti d’Inde au premier siècle, il s'est glissé dans les oasis d’Asie centrale avant d’arriver dans l’Empire du Milieu ! 

Après des jours et des jours de désert, je m’offre quelques jours de repos. Les grottes dont je vous parle attirent des milliers de touristes chaque année. La ville est donc quelque peu occidentalisée. Je profite donc des menus en anglais, du petit déj avec des œufs au plat qui n’ont pas baignés dans une vieille huile, du café soluble, de draps qui n’ont pas vu passer de convois de camionneurs et de bonnes discuts avec des Occidentaux (ces gens qui ne font pas de gros crashas quand on leur parle).  

Les sites touristiques chinois hors-saisons, ce sont des voyageurs qui ont osé mettre leur vie entre parenthèse pour la vivre. Muriel, une Française de 33 ans qui a quitté son boulot d’assistante pour quelques mois, le temps d’arpenter le monde entre Tachkent et Shanghai, Micha un Slovène qui voyage pendant un an entre deux années d’études d’ingénieur, un Japonais parti pour deux ans, etc. Et j’ai une pensée pour Thècle qui continue son beau voyage au Tadjikistan, après avoir croisé Micha en Ouzbékistan.

Demain, c'est reparti pour la vraie aventure. Ainsi, quelques mots de votre part seraient les bienvenues. Pour me dire que mes changements de styles sont très concertants, que Bouddha n’était pas boudeur, que je ne sais pas prendre de photos ou pour tout autre insulte ou éloge. Merci. Mon adresse est sur cette page

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Voilà le genre de dessins que l’on trouve dans ces grottes. Des centaines de petits Bouddhas !

 

Et voilà le genre de statues. Un grand bouddha allongé. Ses disciples le regardent. Ceux qui n’ont pas compris qu'il a atteint le nirvana pleurent et les autres rient.

 

Dans une des grottes, ce bouddha. Haut de 26 mètres.

 

Dunhuang

 

Dunhang est une oasis en plein désert...

 

*

Tout au bout de la rue… les dunes.

 

Des centaines de chameaux attendent d’amener en balade des touristes (chinois pour la plupart).

 

Ça ressemble un peu à Dunhuang plage. C'est bientôt la haute-saison et on termine les gros travaux de trottoirs.

Dans les faubourgs agricoles (2 juin 2006) :

80 kilomètres par-ici, 90 par-là. Avant-hier, 135. Faut dire que dans le désert, les occasions de s’arrêter pour regarder le foot ne se comptent même pas sur un seul doigt. Tant de capacités physiques exceptionnelles, peut-être suis-je passé à côté de ma carrière cycliste... Quoique… Quand on fait des tours de piste ou de France, on peut rencontrer des Ouighours au passage ?

Pas sûr, hein ? Ma destinée est donc bien là, dans cette région du Xinjiang, région des Ouighours, à l’extrême Ouest de la Chine. Grande comme l’Iran (tout de même) vaste désert (je peux en témoigner), loin, bien loin de toute l’agitation du pays.

Les Ouighours en deux mots : un peuple turc d’Asie Centrale. Comme les Ouzbeks, les Kazakhs, les Kirghizes et tout et tout. Mais entre le 19ème et le 20ème, à l’époque où les frontières actuelles se dessinent de manière « irrévocable », ils se retrouvent du côté chinois tandis que leurs « frères » sont du côté russe, puis soviétique. Leur point commun avec les Hans (les Chinois, les vrais, ceux qui font des restaus chinois…) ? Autant qu'entre moi et un Esquimau, il y a donc de la marge.

Dans la région « Ouighour » du Xinjiang, les deux peuples cohabitent donc l’un à côté de l’autre, sans se mélanger. Les Ouighours vont dans des écoles où l’on apprend le ouighour en plus du chinois, les écriteaux sont généralement dans les deux langues (les Ouighours utilisent des caractères arabes). Et on se partage l’espace : les Hans qui arrivent en masse depuis quelques dizaines d’années sont plutôt dans les villes et les Ouighours dans leurs faubourgs. C'est dans ceux d’Hami justement que j'ai rencontré ma super famille.

Début de soirée, après 86 bornes qui ont sculpté mon corps d’athlète, je passe mon doux visage et ma belle roue-avant à travers la grande porte d’un jardin. Du genre, « Toc toc toc, il y a quelqu'un ici ? ». « Entre, entre, allez. Tu veux manger ? » me répond tout de suite une dame qui semblait savoir que je venais exprès de ma petite ville française pour aller à sa rencontre. Tu parles d’une entrée en matière, hein ? Ce n'est pas chez nous, les gens biens élevés, que l’on accueillerait un étranger de la sorte, n’est-ce pas ?

Sous les treilles, la vie paraît bien douce ici. On s’occupe du petit dernier, un monstre que seule la politesse la plus élémentaire m’empêchait d’étrangler. Mais chez les Ouighours (et encore plus chez les Hans qui doivent souvent se contenter d’un seul enfant), les gamins sont des rois et on leur passe tous les caprices.

Pourtant, la vie n'est pas rose du tout. C'est vers 20 heures, tandis que les ombres sont plus longues que jamais, que le mari de mon hôte revient des champs avec ses frères. Quand ce n'est pas la saison du coton, c'est celle du raisin. On sème de la sueur, on se casse le dos et on se noircit les mains.

La seule bonne nouvelle de ce samedi, c'est que l’on ne travaillera pas dimanche. On est dans un pays communiste quand même, on a un respect infini pour les droits des travailleurs ! Allez leur dire à quel point elle est merveilleuse leur société quand vous les croiserez dans leur stand immense à la Fête de l’Humanité (encore une filiale de Bougyues qui adore aussi les petites gens).

Point positif malgré tout dans ce monde de galères : la cohabitation. Dans ces faubourgs qui sortent d’un désert de sable et de roc, vivent Ouighours, Kazakhs, Huis, Mongols et Hans. Tout le monde parle ensemble en chinois et sa propre langue à la maison. On se garde les enfants, on palabre des heures entre voisins à l’ombre des vignes, on mange les mêmes brochettes et l’on boit les mêmes bières au bout de la rue. La mienne, celle en haut de laquelle les étoiles grelottent.

Quelques encouragements seraient les bienvenus. Donc n’hésitez pas à m’envoyer un mail. Mon adresse est sur cette page.

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Pas mal de femmes se baladent avec un masque blanc. Chirurgiennes qui vont faire une opération ? Grippe aviaire ? Nouvel islam relooké ? Pas du tout. Ces dames considèrent que le bronzage n'est pas du tout un critère esthétique positif. On veut rester le plus blanc possible !

 

Rencontre sur la route. Impossible de lui faire décrocher un mot.

 

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Tout seul dans mon désert pour la nuit.

 

Un problème que je n’avais pas du tout anticipé : je subis de subites attaques d'abeilles à plusieurs reprises. Il faut dire que les Chinois ont la bonne idée de faire du miel sur leurs péages… Deux piqûres, de belles frayeurs… Je dois mettre un sac plastic sur la tête sur plusieurs kilomètre. Ça me fait perdre quelques litres d’eau de sueur !

 

Le vrai désert.

 

*

Jalitcham, mon hôte ouighour dans les faubourgs d’Hami. Au premier plan, son petit, un être absolument adorable.

 

Deux Hans, un Kazakh et mon hôte Ouighours. On cohabite dans ces faubourgs d’ouvriers agricoles.

Le sens du vent et des kilomètres :
(23 mai 2006)

Pendant ma première journée, j’ai de la fumée qui me sort des oreilles tellement ça turbine dans ma caboche… Ces kilomètres devraient être ceux durant lesquels je gagne ma liberté, durant lesquels je me sens pousser des ailes… Mais non, c'est un véritable supplice. Éole souffle tellement fort que les Chinois ont construit une usine d’éoliennes sur ma route. Avec ça, ils ont de quoi chauffer Urumqi pour l’hiver.

Et moi, le nez au vent, je ne comprends pas ce qui m’arrive. Une lutte infernale, aucun plaisir et le sentiment de m’être embarqué dans une drôle d’aventure pas marrante pour un yuan. Quel est le sens de cette démarche ? Pourquoi exactement est-ce que je me bats en ce moment ? Je fais 25 bornes ce jour-là. Pas de quoi faire une réception avec Monsieur le Maire et tous ses conseillers.

En fin d’après-midi, je m’installe dans une espèce de baraquement, épuisé. Je m’octroie quelques minutes de lecture, d’évasion de cet enfer, avant d’y replonger (je lis d’ailleurs L’Évangile selon Pilate). Et voilà qu'au moment où je m’apprête à soulever mes 79 kilos, un Chinois fait son apparition. Il a une piaule dans le petit couloir derrière moi. Il comprend que pour moi, le chinois, c'est du chinois, alors il me parle par gestes. Je sors mon traducteur automatique, et on commence à taper la discute… Vous me comprenez, n’est-ce pas ? Un Chinois que je comprends, je ne pouvais pas le laisser filer, c’était trop beau.

Chu Jaï Jouï est routier et c'est dans cette minuscule piaule qu'il crèche. Sa patronne doit là lui louer car elle est juste à côté. L’homme est élégant, bien rasé, bien coiffé. Célibataire, les filles ! C'est à mon avis un bon parti. Plutôt beau gosse, il a 32 ans et a l’air cultivé. Il a d’ailleurs ramené le journal du coin avec son pain et ses bananes. Pour donner un côté un peu solennel à l’événement, j’ouvre mon paquet de chips aux travers de porcs.

Il n'est pas très riche Chu Jaï Jouï. 250 euros par mois, mais je peux vous dire qu'il bosse comme un sourd. Au lieu de discuter avec moi, il aurait d’ailleurs mieux fait de dormir un peu car il doit aller chercher des cailloux dans la montagne cette nuit. Il m’embarque dans cette affaire et dans son camion. Rien de palpitant, je n’avais pas compris qu'il ne me redéposerait dans son baraquement qu'à 2 heures du mat’, avant d’aller livrer ses gravats à un fabricant de ciment. On a eu le temps de parler politique, football, famille… Il est originaire d’une ville toute proche du Kazakhstan. Il n’a pas trop d’amis ici. Ses copains sont plutôt dans son village et à Urumqi. Cette piaule semble pourtant être son lieu de vie principal. Le lit est fait, la chambre proprette. Quelques photos de filles collées au mur. Mais aucune n'est à poil. Chu Jaï Jouï est un homme distingué.

Je ne vais pas vous révéler tout ce qu'il pense de son président, de Bush ou de l’équipe de football chinoise. Mais en discutant avec lui, j’ai compris que j’étais venu pour le rencontrer. Et pour rencontrer tous les Chu Jaï Jouï du pays. Aussi naïf que cela puisse être, mon petit passage sur terre, je voudrais l’optimiser pour mieux connaître mes semblables, les hommes. Et au regard des craintes qu’inspire autour de moi ce genre de voyages au long cours, je comprends que l’on se connaît mal. On connaît mal son pays, les autres pays, les autres… On ne connaît que sa famille, ses copains, ses collègues… et encore. Le reste, forcément, on n’en entend parler que par intermédiaires (par les médias en général, lâchons le mot). Mais les médias, leur rôle n'est pas de parler de Chu Jaï Jouï. Et Chu Jaï Jouï, il est comme moi, comme vous. Il fait partie de cette majorité sur terre que l’on oublie, celle dont on n'entend jamais parler si on ne va pas la rencontrer. Celle des gens simples, honnête, qui travaillent, qui vivent de petits bonheurs et de grands espoirs, de ces braves gens. Oui, braves gens. Ce sont eux qui m’intéressent, les braves gens. Je pourrais rebaptiser ce voyage et ma vie d’une manière générale le Braves Gens Tour. J'ai compris que je n’avais pas fait beaucoup de kilomètres. Mais que ces kilomètres avaient un sens. Ça m’a rappelé que la Chine, comme le reste du monde, c’était avant tout des gens braves et simples. Des gens comme nous, ou presque. Et j'ai hâte de les rencontrer.

Quelques encouragements seraient les bienvenus. Donc n’hésitez pas à m’envoyer un mail. Mon adresse est
sur cette page 

 

 

 

 

 

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Hami. Enfin une ville de Chine avec plein de vélos. Sur de larges trottoirs, on se partage l’espace entre piétons, vélos, vélos électriques et scooters électriques. Ces deux derniers font un tabac ici. On a moins de beaux discours qu'en France, mais on est passé à l’action. Ça coûte moins de 300 euros, l’autonomie est de 50 à 80 bornes et le temps de chargement de 8 heures. Je me laisserais bien tenté…

 

Je passe une soirée dans une famille ouighour. Ces derniers vivent souvent dans les champs. Dans ma famille, on cultive le raisin ou le coton, selon les saisons.

 

Et dans ce désert, le QG des employés du péage sont des lieux précieux où je me rafraîchis et me repose.

 

Je fais pas mal de pauses dans les stations services.

 

Seul dans mon désert. Je me suis rasé, coupé les cheveux. J’ai enfin l’air de quelqu’un de civilisé.

 

Chou Jaï Jouï dans son camion. Transporter des gravas, ce n'est pas de tout repos. Départ à 22h, pour monter, là-haut dans la montagne. Une piste à n’en plus finir et un tractopelle nous attendent.

 

Celles qui m’ont connu beau auront peut-être un choc en voyant cette photo. Après deux jours de vent de face, il semble que j'ai quelques problèmes capillaires qui font bien rire les Chinois. Il paraît que mes cheveux finiront par retrouver leur position et nombre initiaux. Je l’espère en tous les cas. 

 

Une petite chinoise cherche dans ma méthode Assimil… Elle a quelque chose à me dire. J’espère que ça n’a pas de rapport à ma coiffure.

 

Je partage ma petite route avec quelques camionneurs. Une superbe autoroute me nargue de l’autre côté de la rivière, mais son embranchement n’arrive jamais. Les cyclistes y étant tolérés, elle aurait évité à mes bagages de tombés toutes les 5 minutes à cause des bosses.

 

Mais les routes peuvent aussi être en parfait état.

Il n'y a plus qu'à partir (19 mai 2006) :

La Chine, le pays du vélo ? Tu parles. J'ai mis des plombes avant de trouver un marchand de cycle. Ici à Urumqi, à l’extrême Ouest de la Chine, la petite reine c’est la voiture. J’ai finalement trouvé une monture de marque à 130 euros, l’aventure va pouvoir commencer. Je l’ai bien sûr customisée, je ne suis pas du genre à me contenter du vélo de M. Tout le Monde, fusse-t-il Chinois. J’avais ramené de France porte-bagages, sacoches, compteur, pédales qui se clipssent sur les chaussures pour être tirées par les cuisses… et même un super klaxon à pile à 19 mélodies… Demain matin, armé d’un petit traducteur électronique anglais-chinois (14 euros dans le centre-ville si vous avez le temps de passer), je pars à la rencontre de la Chine. Je vais l’ausculter, la regarder sous toutes ses coutures pour essayer de la comprendre (un peu) et de vous donner (un peu) envie de faire de même (oui, je sais, ce n'est pas le moment, vous avez un truc à rendre et un coup de téléphone à passer, mais j'ai du mal à me caler sur les horaires de tout le monde).

Urumqi est une ville très particulière. Complètement excentré, loin de toute l’activité économique de la côte Est du pays, elle est considérée ici comme un trou perdu. Et pourtant, je vous jure que je ne me sens pas du tout dans une petite ville de province. Des fast-foods à tire-larigot, des buildings qui nous regardent de haut, des parcs qui parsèment la ville, des rues entièrement consacrées au commerce de MP4, de Palms ou d’ordis en tous genres… et du monde qui grouille de partout. J’ai l’impression d’être un peu au centre du monde. Et ça me fout un choc vu que je croyais qu’il était en bas de chez moi.

Cette ville est la capitale d’une région qui est historiquement davantage tournée vers le Kazakhstan, le kirghistan ou le Tadjikistan que vers l’Est chinois. Elle est peuplée en majorité d’un peuple d’origine turc (tout comme les Kazakhs, les Ouzbeks, les Kirghizes, pas loin…) qui s’appelle les Ouighours. Ils sont un certain nombre d’ailleurs à vouloir l’indépendance. Leurs voisins l’ont bien obtenue après l’éclatement de l’URSS ! Mais Pékin ne l’entend certainement pas de cette oreille. Ainsi, depuis quelques années, elle encourage vivement les Hans (l’ethnie majoritaire chinoise) à venir s’installer dans cette province du Xinjiang (ou « Ouighourstan » pour les indépendantistes). Ce sont deux copines, han et ouighour qui m’ont ainsi aidé à trouver mon marchand de vélo. Mais j’aurais je pense, l’occasion de revenir sur cette cohabitation parfois heureuse, parfois moins ! Repassez de temps en temps sur le site pour y voir la prochaine chronique ! Et n’hésitez pas à laisser un message sur le forum ou me contacter via cette page

 

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Mon marchand de vélo me fait tous les réglages. Il me fait profiter à l’avance d’une promotion qu'il lance dans quelques jours. Cool ! 

Dans un restau kazakh d’Urumqi, ça danse, jusqu’au bout de la nuit. Il y a des Kazakhs de part et d’autre de la frontière. En Chine et… au Kazakhstan. Les premiers écrivent en caractères arabes et les seconds en caractères cyrilliques. On n’arrive pas à se lire, mais on parvient à se comprendre et à danser sur les mêmes chansons d’amour. 

N’allez pas imaginer une toute petite ville de rien du tout. Urumqi est très impressionnante avec ses trois millions d’habitants officiels. Les vieux immeubles (au premier plan, prenez votre loupe) laissent place aux nouveaux ultra-modernes.

Une forme d'inquiétude :

Le 1er mai 2006, je m'envole pour l'Asie centrale. Le 15 mai, je rejoins l'extrême Ouest de la Chine, la ville d'Urumqi. Capitale régionale du bout du monde, je n'y passe que quelques jours pour y acheter et préparer ma monture, un vélo local avec lequel je compte traverser le pays et atteindre Hong Kong.

Ce sera la plus difficile des expéditions que j'ai réalisées à vélo. Mon périple Odessa-Tachkent ressemblait sans doute à une colonie de vacance PTT à côté de ce qui m'attend. Les obstacles sont infinis : une langue à tons qui n'est pas uniforme d'une région à l'autre, une culture indéchiffrable pour un occidental normalement constitué, l'interdiction pour les Chinois d'héberger des étrangers, des montagnes à se faire et quelques problèmes au genoux avant même le premier coup de pédale. Mon docteur n'était pas encourageant : "Le vélo, ce n'est théoriquement pas pour vous". Me voilà bien avancé.

Malgré tous ces freins, mon objectif est d'aller aux forceps à la rencontre de la Chine dans sa diversité ethnique, culturelle, géographique, économique, etc. Je ne vise pas l'exploit physique mais l'exploration des Hommes et des cultures ! 

Mon pari chinois est audacieux ! N'hésitez pas à m'encourager d'une manière ou d'une autre. 

Mon exploration précédente a abouti à la création de la Bourse 3600km.net. Que donnera cette nouvelle aventure ?

Rendez-vous mi-mai pour les premières chroniques sur ce site. 

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On prépare un spectacle de danse.

 

 

 

Le temps du pollen 

Certains (toujours les mêmes) ressortent leurs mouchoirs, tandis que le vent promène des vagues de pollen sur le goudron. Je sais alors que le temps est venu pour moi aussi de me laisser porter, non plus par le vent, mais par ma volonté. L'heure d’un nouveau départ, d’un nouvel inconnu qui le deviendra un peu moins. Besoin d’avoir besoin de revenir.

Les années et les amis passent. Chaque heure le son d'un mail, chaque jour la fatigue du soir, chaque semaine un vendredi, chaque mois un bulletin, chaque année l’assemblée générale. Le temps nous courbe, nous exalte, nous routine. Et ma vie dans tout ça ?

Demain, je m’en vais traverser la Chine à vélo. Et qu'importe si je n'y arriverai pas, tans pis si ce sera dur. Moi, ma vie j'ai jamais voulu la vivre pour un salaire ou pour réfléchir sur les pistes d’amélioration de la formation professionnelle. Un appart’, à manger, des week-ends, la santé, des amis, encore mieux de l’amour. Maintenant donnez-moi de l’air. Mon téléphone vibre davantage que moi, ça ne va pas du tout.

Je ne sais pas si aller voir plus loin que le bout de mon nez va me mener bien loin. Je sais qu'après avoir fait le tour du monde, je reviendrai au village natal (celui où sont enterrés les miens). Mais j’en ai juste envie, juste besoin. C'est anecdotique, c'est un peu pathétique, mais j’y vais quand même.

Les Russes, je ne les connaissais pas avant. Les Kirghizes non plus, les Croates, les Kosovars, les Irakiens, les Bulgares et les Géorgiens. Ils ne furent peut-être que des verres à boire un soir, des bouffées de tabac d’un moment ou des cernes d’un matin. Mais j'ai essayé de les comprendre. On ne peut jamais comprendre un peuple, un pays (qui peut comprendre “la France” ?), mais malgré tout, peut être que j’en ai compris pas mal dans le tas.

Alors une fois qu'ils sont partis, une fois qu'on a lavé les verres, que j’ai repris mon avion et mes articles sur les MBA, qu'est-ce que j’en garde ? Autant que le souvenir d’une jolie fille dans le métro ? Non. J’ai l’impression que chacun d’entre eux forme un bout de moi. À force de comprendre, de compatir, de m’identifier à des gens aussi “différents”, j’ai fini par devenir “différents” aussi. Je suis pluriel, je suis “des”, je suis “les”.

Cela ne m’aide pas à me lever plus tôt le matin, mais je crois que cela m’aide à plus vite comprendre tout le monde, à cerner les modes de pensées, les limites et les potentiels de chacun et de moi en particulier. Mais tout cela dépasse la réflexion. Je suis pluriel et c'est ainsi. Je vais donc chez les Chinois pour étendre un peu plus ma gamme d’êtres. Mais j’ai peur de ne pas y trouver ma place et peut-être pour la première fois, de ne pas comprendre.

Mais s'il vous plaît, ne vous dites pas juste “il n’a qu'à pas partir, ça ne me viendrait pas à l’idée de faire ça”. Je vous l’ai dit, ça dépasse la réflexion. Je ne suis pas fou et j'ai peur ! 

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